Le chômage en temps de COVID-19, une stigmatisation réelle qui pourrait nuire à la recherche d’emploi

Par Paul Logothetis

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Jeune femme en manque d'inspiration regardant longuement par la fenêtre d'un bureau
Johnny Cohen (Unsplash)
Une enquête expérimentale révèle que les personnes qui n’ont pas travaillé pendant la pandémie de COVID-19 sont perçues plus négativement que les personnes demeurées en emploi.

Regina Bateson, professeure adjointe à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de la Faculté des sciences sociales, nous explique les conclusions de son étude démontrant le revers social et économique qu’ont subi les personnes sans travail pendant la pandémie.

Voici ses réponses à nos questions.

Question : Comment avez-vous conduit vos recherches?
Regina Bateson : J’ai réalisé une enquête expérimentale préenregistrée auprès d’un échantillon représentatif de 974 adultes aux États-Unis. J’ai attribué aléatoirement des historiques d’emploi pendant la pandémie à des personnes fictives en recherche d’emploi, puis j’ai demandé aux personnes sondées d’évaluer les candidatures.

Q : Qu’avez-vous découvert?
RB : Malgré un profil semblable, les personnes qui ont eu une interruption professionnelle pendant la pandémie étaient perçues plus négativement que les autres. La perception était la même, peu importe le cas de figure : mise à pied de longue durée, mises à pied et embauches au gré des confinements et des réouvertures, interruption de l’emploi pour aider les enfants à faire l’école à distance.

En comparaison avec des gens au même profil qui sont restés en emploi pendant la pandémie, les candidates et candidats fictifs dont le CV contenait des interruptions tendaient moins à être perçus comme étant professionnels, qualifiés, travaillants, motivés ou dévoués. Ces personnes étaient aussi moins souvent choisies pour pourvoir un éventuel emploi.

Même si les pertes d’emplois ont été très fréquentes et que les travailleuses et travailleurs n’y pouvaient rien, les résultats suggèrent que le chômage en temps de pandémie s’accompagne d’une stigmatisation. La poussière est peut-être en train de retomber, mais pour les personnes qui ont maintenant des trous dans leur CV, les effets sociaux et économiques de la pandémie pourraient se faire sentir pendant des années.
 

Regina Bateson
Faculté des sciences sociales

« La stigmatisation a des conséquences sociales et psychologiques pour les millions de personnes qui ont été sans travail pendant la pandémie. »

Regina Bateson

— Professeure adjointe à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales

Q : Comment les employeurs et les organismes publics aident-ils ces personnes?
RB : Tout au long de la pandémie, les gouvernements sont venus en aide aux personnes qui n’avaient plus de travail, et l’on ne croyait pas que ces périodes de chômage allaient nuire aux chercheuses et aux chercheurs d’emploi. D’après mon étude, on a trop fait preuve d’optimisme. Même au lendemain de la pandémie, les gouvernements doivent être conscients que celles et ceux qui n’avaient pas d’emploi pendant la pandémie peuvent subir de la discrimination et de la stigmatisation au moment de chercher un nouvel emploi ou de progresser dans leur carrière.

Les responsables du recrutement doivent également garder à l’esprit que les stéréotypes pandémiques peuvent venir brouiller l’évaluation d’une candidature.

Q : Un dernier mot?
RB : Il faut bien noter que l’étude mesure la perception d’une candidature, et non les effets réels sur le marché du travail. La demande de main-d’œuvre est très forte : le marché tel qu’il est actuellement annule peut-être les effets qu’on attendrait. Cela dit, quand le marché finira par refroidir, le chômage pendant la pandémie pourrait devenir un handicap.

La stigmatisation a aussi des conséquences sociales et psychologiques pour les millions de personnes qui ont été sans travail pendant la pandémie.

« Perceptions of pandemic resume gaps: Survey experimental evidence from the United States » par Regina Bateson, publié dans Plos One le 16 mars 2023. DOI : 10.1371/journal.pone.0281449
 

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